• Zeller traque sans répit les résistants et parachutistes réfugiés dans le département. Cette poursuite aboutit finalement à la capture du capitaine Marienne le 12 juillet 1944 au village de Kerihuel (ou Kerhihuel). Mais laissons Marie Chamming’s, jeune agent de liaison, raconter ce drame.


    « L’homme était entré brusquement (dans le café Gilet) : les patriotes qui buvaient un verre de cidre restèrent une seconde immobile, le regardant. Il ouvrit son imperméable et se montra en tenue de parachutiste. Les garçons se levèrent, troublés. On commençait à beaucoup parler de faux parachutistes. Voyant leur hésitation, Munoz (un agent de l’Abwher) sortit une carte d’identité. " Vous voyez bien que je suis des vôtres" leur dit-il. Ils se passèrent la carte du lieutenant parachutiste Grey de main en main. Comment auraient-ils deviné qu’il venait d’être arrêté avec Jego (le 11 juillet à Lizio). Pas de doute, elle était bonne.

    Il leur avait demandé où était le boucher Mahieux."C’est lui ; leur avait-il confié, qui me conduira au capitaine Marienne." A quoi bon Mahieux ! puisque eux, les garçons, ils savaient où l’envoyer ! "Adressez vous au charron de Cadoudal, près de Kerhihuel", dirent ils enfin.
    (Les trois résistants, le patron du café et le boucher Mahieux seront arrêtés par les hommes de Zeller et envoyés à Locminé où ils seront interrogés et torturés par des hommes du Bezen Perrot et du SD- DCT).

    L’aube (12 juillet) va se lever. Le jeune garde s’est assoupi. Un coq a chanté. Dans les taillis où ils (parachutistes) ont établi le nouveau camp, ils dorment encore profondément. Trois voitures ont déjà quitté Locminé, avec douze hommes armés de révolvers et de mitraillettes. Munoz est accompagné cette fois de Zeller, avec Gross (Abwehr), Luis Deniz, Herr et Fischer.

    Munoz descendit un peu avant le village de Cadoudal et vint chez le charron. "Allez chez Danet, à la ferme qui est là", lui dit celui-ci."Demandez aux gens qui dorment ici" dit à son tour le fermier quand Munoz s’enquit du capitaine. Zeller, les miliciens et les Allemands suivaient l’approche, cachés derrière les talus. Munoz ayant fait le signe convenu, ils se démasquèrent et encerclèrent l’appentis où couchaient huit jeunes gens. Leurs armes étaient entassées à l’entrée. "Où est Marienne ?" hurla Fischer. (Marienne et ses hommes sont arrêtés) Au bout d’un quart d’heure de coups et d’injures, n’en tirant rien, les Allemands menèrent leurs prisonniers jusqu’à la cour de Kerhihuel. Les jeunes F.F.I. étaient toujours étendus sur le sol."Où sont les officiers ?"demandèrent les Allemands. Marienne et Martin (François, lieutenant) s’avancèrent. "N’oubliez pas que nous sommes des soldats !" dit Marienne, mais on l’obligea avec Martin à se coucher à côté des garçons. Les autres parachutistes (Judet, Mendes-Caldas, Beaujean, Bletterie, Marty, Hannicq) furent poussés contre un bâtiment : on leur fit lever les bras et on fouilla encore ceux qui étaient habillés, car plusieurs n’avaient que leur caleçon, comme le sergent Judet. Une première rafale partit et son camarade s’écroula à côté de lui. (Judet sentant sa dernière heure arrivée tente le tout pour le tout et réussit à s’échapper. Il sera tué en Hollande le 09 avril 1945). Ils les tuèrent tous, les huit patriotes (Morizur, Louail, Le Breton, Gondet, Denoual, Grignon, Le Bomin, Garaud), le fermier Danet, Alexandre et Rémy Gicquello, et les sept parachutistes, devant le groupe de femmes épouvantées, debout dans un coin de la cour. Les traîtres se firent photographier devant les hommes étendus morts, la face dans la poussière. Zeller avait le visage sombre, mais les autres riaient."

    Les hommes de Zeller récupèrent des documents sur les cadavres des parachutistes qui leur permettent d’identifier d’autres camps. Ainsi la troupe du lieutenant de Kerillis, dit Skinner, est capturée deux jours plus tard dans la région de Trédion. Zeller torture la femme et la fille du fermier qui abritait les résistants et tous les hommes à l’exception des deux officiers, (Skinner, Fleuriot) sont abattus puis jetés dans les flammes de l’incendie de la ferme. Skinner et Fleuriot, blessés, sont enfermés dans la prison de Pontivy. Ils sont exécutés par Zeller et ses hommes quatre jours p lus tard, dans la région de Bieuzy.


    Jusqu’à la fin du mois de juillet, la traque se poursuit. Devant la progression des trois forces blindées américaines, les hommes de la FAT quittent Pontivy le 03 août, direction Angers. Les collaborateurs s’y regroupent le 06 août, avant de gagner Paris le 12, puis l’Allemagne où Zeller tentera de monter des commandos destinés à opérer en France. Il est finalement arrêté le 04 mai 1945, à la frontière Suisse par des gendarmes français. Il sera jugé et fusillé à Rennes en 1946, en compagnie de Gross et de Munoz . . .

    Source: BRETAGNE - Occupation et Libération (forum)


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  • Le drame de Kerihuel ( Rapport du sergent Judet )

    Un document d'archive retrouvé: Le rapport que le sergent Judet à adressé à ses chefs le 13 juillet 1944 après la tuerie de Kerihuel en Plumelec en représailles des combats de Saint-Marcel.

    Le Sergent Judet, qui venait d'échapper à la mort, devait trouver une fin glorieuse au cours de l'opération Hollande.

    Le 12 juillet, vers 6 heures du matin, nous fûmes réveillés brutalement, le Capitaine Marienne, le lieutenant Martin, le sergent Marty, le caporal Beaujan, les soldats Bletterie, Flamant et moi même, par une quinzaine de miliciens et agents de la Gestapo en civil et quelques allemand en uniforme. Deux miliciens étaient entrés sous notre tente, braquant chacun, sur nous, une mitraillette et nous injuriant à qui mieux mieux. Nous fûmes conduits à la ferme qui nous ravitaillait. En arrivant dans la cour, je vis étendus par terre, les mains sous la tête, mais encore vivants, une vingtaine de civils hommes et une dizaine de femmes debout. Nous fûmes fouillés. Le Capitaine Marienne et le Lieutenant Martin fûrent séparés de nous et sur un ordre, se couchaient à côté des civils, dans la même position que ces derniers.

    Jusque là je croyais encore être simplement fait prisonnier et échafaudais déjà un plan d'évasion, lorsque j'entendis une rafale et vis mon camarade Flamant à ma droite se crisper. Alors, jouant le tout pour le tout, j'ai tenté ma chance et sauté par dessus le corps de Flamant et je me suis enfui à travers buissons situés tout près. Poursuivi par deux de nos exécuteurs dont je ne puis préciser la nationalité qui m'arrosèrent copieusement de rafales de mitraillettes sans parvenir à me toucher.

    La poursuite dura une dizaine de minute. Je marchais à travers la campagne sans but, encore sous le choc, lorsque j'ai rencontré le Caporal Chef Pacifici. Nous fîmes alors route ensemble en direction de Callac. Sachant que des documents très importants pour notre sécurité à tous étaient tombés aux mains de l'ennemi, nous avons tout de suite pensé à assurer une liaison avec l'Etat-Major pour le prévenir des événements et prendre les mesures nécessaires.

    J'insiste sur le fait qu'un officier allemand, ainsi que deux autres militaires allemands également en tenue prirent une part active à notre capture et l'assassinat de mes camarades.

    Le Sergent Judet

    Signé: Judet

    Additif au rapport du Sergent.

    Un témoin oculaire dont je ne puis révéler des maintenant l'identité, interrogé par moi, à déclaré ce qui suit :

    Le matin du 12 juillet 1944, vers 4 h 00 ( heure solaire ), des miliciens en civil et des allemands en uniforme entrent dans la ferme. Les femmes furent rassemblées dehors. Les fermiers et les F.F.I reçurent l'ordre de se coucher dans la cour, les mains sous la tête. Un peu plus tard, j'ai vu arriver un groupe de parachutiste, l'un deux à peu près nu, encadrés d'allemands et de miliciens. Les parachutistes furent mis au mur. Le Capitaine Marienne et le Lieutenant Martin reçurent l'ordre de se coucher à côté des patriotes. Tous furent fusillés. J'entendis alors de nombreux coups de feu. Ne pouvant contenir mon émotion, je fermai les yeux. Lorsque je les rouvris, les parachutistes gisaient inanimés. Le capitaine Mariennes, le Lieutenant Martin, ainsi qu'une quinzaine de patriotes avaient été assassinés. J'appris plus tard, qu'un parachutiste et quelques patriotes s'étaient évadés. Les allemands pillèrent ensuite le hameau, puis incendièrent les bâtiments. Les corps de quelques parachutistes et patriotes brûlèrent avec la ferme. Un autre parachutiste fut pris ensuite et fut roué de coups pour le faire parler, puis fut ensuite emmené.

    Le 13 juillet 1944, Sergent Judet

    Nous, Sergent Detroy Jacques, Caporal-chef Pacifici, déclaront l'authenticité de la présente déclaration, ayant été présent à l'interrogatoire du témoin . . .

    Source: Ami entend-tu n°30 de 1975. 

     


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