Les SAS du 4e régiment sont les premières troupes alliées à combattre en France dans
le cadre de l'opération Overlord dans la nuit du 5 au 6 juin 1944, dès 22 h. Plus tard dans la nuit, des sticks des 1er SAS embarqués depuis un aérodrome en Angleterre seront également parachutés dans le Morvan et dans la Vienne, tandis que les autres forces des SAS seront destinées à harceler les Allemands dans leur retraite durant les
semaines suivant le Débarquement.
En Bretagne, prélude au grand rassemblement sur la drop zone de La Baleine, près de la ferme de la Nouette (article précédent : L'organisation du maquis dans l'Est du
Morbihan), quatre sticks "précurseurs" du 4e SAS furent déployés par les airs : deux
furent parachutés dans les Côtes d'Armor entre Locarn et Duault, les deux autres au dessus de Guéhenno et de Plumelec, dans le Morbihan. Ces derniers représentaient 35
hommes, placés sous la responsabilité des lieutenants SAS Marienne et Déplante.
Leur atterrissage à Plumelec ne leur laissa guère de répit : plusieurs commandos
parachutistes du stick de Marienne furent repérés par les Allemands depuis
l'observatoire de la Grée, tout proche. Ces derniers dépêchèrent aussitôt des soldats (en l'occurrence de nationalité soviétique) qui parvinrent très vite à capturer quatre SAS :trois radios et le caporal Emile Bouëttard. Ce dernier est blessé à l'épaule. Les Russes
l'achèvent d'une balle dans la tête, peu avant minuit. Le Breton est la première
victime de la Libération... Les Russes s'apprêtaient à tuer les trois radios quand
leur geste fut stoppé net par des officiers Allemands. "Les Russes étaient redoutables",
se souvient Joseph Jégo. On en a su quelque chose après la bataille de Saint-Marcel.
Avec les Allemands, ils se sont livrés à de terribles représailles, notamment à
Plumelec." Il s'agissait souvent d'Ukrainiens et de Georgiens enrôlés par les Nazis sur le
front Ouest.
Les 4e SAS parachutés pour préparer
les sabotages et former les maquisards
La zone de déploiement des Special air services
Les sticks des 4e SAS furent parachutés à Duault dans les Côtes d'Armor et près de Plumelec
(Morbihan), à un kilomètre seulement de l'observatoire de la Grée (photo ci-dessous),
moulin occupé par les Allemands. Les SAS du stick du lieutenant Marienne furent sitôt repérés.
Lieutenant Marienne
Joseph Jégo était placé sur les routes avec d'autres résistants, non loin de Saint-Aubin en Plumelec, lorsqu'il assista au parachutage du premier stick de Marienne. "A vol d'oiseau, ils étaient à 4-5 kilomètres."
Il l'apprend plus tard : le groupe est parachuté à 2 km de l'endroit prévu, par erreur, soit à 1 km seulement du plus haut observatoire
allemand du Morbihan, à La Grée ! "Le stick de Marienne a été attaqué dans les vingt minutes suivant l'atterrissage. On peut penser que l'existence de cet observatoire n'a jamais été signalée à Londres !" Les échanges de tirs, Joseph Jégo les a entendus retentir pendant 10-15 minutes. "Ils étaient très nourris. Puis, il y eu une
pause. Ca devenait inquiétant. Avec le camarade qui m'a recruté dans la Résistance,
nous avons quitté notre poste de garde. Entre temps, l'Etat major de Saint-Aubin s'est replié à La Nouette en Sérent. Nous sommes partis au bourg de Plumelec puis le lendemain à la ferme familiale. C'est là qu'on nous a dit que l'Etat major (placé sous la direction du colonel Morice et du commandant Bourgoin) était parti pour Sérent. A notre
tour, nous sommes allés là-bas". Les deux sticks qui avaient pour mission de former les
maquisards au maniement des armes avaient prévu de se rassembler en longeant
la rivière de la Claie. Leur parachutage éloigné et tragique compliqua donc la
donne. Pendant que Pierre Marienne et une partie de ses hommes se dirigent vers la
Claie (rivière) , un autre groupe, mené par le sergent chef Rofast et un capitaine anglais en civil du nom de Hunter, prennent la direction de Saint-Jean-Brévelay. Le jeune agent de liaison Raymond Guillard est chargé par le colonel Morice de récupérer ces deux
hommes les 6 et 7 juin. C'est également le 7 juin que le groupe de Marienne rejoint
finalement La Nouette, où arrivent également plusieurs groupes de paras des
SAS des Côtes d'Armor. Le site de La Nouette (dit La Baleine) est investi depuis par plusieurs bataillons : le 8e bataillon FFI du commandant Caro (cantons de Josselin,
Saint-Jean-Brévelay et Rohan) ainsi que le 2e bataillon du général de la Morlaix des
cantons de Ploërmel et Malestroit. Le 4 juin, les opérations de destruction des voies ferrées sont lancées sous le nom de code : « Les dés sont sur le tapis », message diffusé le 4 juin par Radio-Londres déclenchant le Plan Vert. Le lendemain, le message « II fait chaud à Suez » lance le plan rouge : il sonne le début des opérations de guérilla. Les maquisards FFI de la région affluent à La Nouette. Pour les SAS, c'est la stupeur. Formés aux opérations commando discrètes, ils tombent des nues en découvrant un camp retranché de cette ampleur, en totale contradiction avec les consignes de discrétion. Ils doivent composer.
En plus de leurs missions de sabotage, ils prennent en main la formation des quelque
3.000 maquisards (dont quatre bataillons de l'Organisation de la résistance armée).
L'ambiance prévalant sur le camp retranché est surréaliste : plusieurs milliers de jeunes
plus ou moins disciplinés et préparés aux armes, sillonnent le camp de long en large
avec le litre de cidre et le casse-croûte. Ils entrent et sortent, parfois sans contrôle aux
entrées, même si le terrain est couvert de tous côtés par des unités des FFI ou
parachutistes faisant le guet. Le camp de Saint-Marcel ne cesse de grossir avec
l'arrivée le 9 juin à l'aube de la 7e compagnie de Plumelec avec plusieurs charrettes de ravitaillement. Parallèlement, les parachutages se poursuivent : celui du commandant Bourgoin*, dit Le Manchot, dans la nuit du 10 au 11 juin. De toutes les batailles d'Afrique du Nord (Syrie, Libye, Tunisie), commandant du 2e Régiment de chasseurs parachutistes (2e RCP), Pierre-Louis Bourgoin prend la direction des opérations (4e Bataillon de l'infanterie de l'air). Il doit son surnom de Manchot pour avoir été amputé du bras droit en Afrique du nord et porte 37 traces de blessure ! Son arrivée précède le parachutage dans la nuit du 12 au 13 juin, des SAS du stick Juillard. Le stick était composé de dix Tahitiens volontaires, qui ont rallié Auckland sur une goélette puis un phosphatier. De là, ils avaient été acheminés en Angleterre, à Cirencester, avec des volontaires néozélandais pour une année de formation au commando. (Les Tahitiens dans la guerre/musée de Saint-Marcel). Enfin, dans la nuit du 17 au 18 juin sont parachutés sur La Baleine les hommes du lieutenant Roger de la Grandière (1er BIA placé sous les ordres du 4e BIA de Bourgoin). Ils ont largué avec quatre jeeps équipées de deux mitrailleuses Wickers d'une puissance de feu de 3.200 coups/minute. Hélas, le container se brise à la réception et une seule mitrailleuse est reconstituée. Les autres sont remplacées par des fusils mitrailleurs. Après la bataille de Saint-Marcel, Roger de la Grandière prend la direction de Pontivy. Il est hélas blessé et achevé par les Allemands alors qu'il couvrait ses hommes dans une ferme de la région de Josselin.
Le rôle clef des Special Air Service
Le Special Air Service (SAS) est une unité de forces spéciales britanniques créée en 1941 par le lieutenant David Stirling avec des volontaires britanniques.
Cette unité d'élite au rôle capitale durant la seconde guerre mondiale s'est illustrée en
Afrique du Nord puis en Europe par ses raids et commandos très efficaces. Ils
s'avèrent particulièrement exposés derrière les lignes allemandes. Les SAS étaient
constitués de cinq régiments : deux régiments britanniques (1er et 2e SAS), deux
régiments français (3e et 4e SAS) constitués avec l'accord du général de Gaulle et un
régiment belge (5e SAS). Chaque régiment SAS comprenait "quarante sticks" de dix
hommes. Les SAS ont payé un très lourd tribus à la guerre. Sur les 215 SAS français
engagés avant le 8 novembre 1942, seuls 22 étaient encore en vie à la capitulation du 8 mai 1945, soit 90% de pertes.