• Tentative de Morin et Goësbriand.

    Ici, mieux vaut laisser la parole à Goësbriant, dont j'ai l'émouvant récit :

    Je demande à Morin ce qu'il fait : Je ne veux pas être prisonnier! On fout le camp ! Tout de suite nous partons. Nous filons le long d'une haie; par bonheur, il y en avait. Un troisième se joint à nous. Après une cinquantaine de mètres, nous nous camouflons dans une haie, au bord d'une route secondaire.

    Il était temps. Sans nul doute, le Bataillon était déjà prisonnier en entier. Cinq minutes ne s'étaient pas écoulées que des Allemands battaient les environs pour recueillir les derniers réfractaires. L'homme qui s'était joint à nous n'avait pas eu la précaution de se mettre comme nous deux dans la haie. Il s'était placé à 7 ou 8 mètres de nous, au bord de la haie, du côté de la route. Il fut ramassé. Nous ne fûmes pas
    vus. Nous ne respirions plus. Ils partent, mais c'est un défilé toute la soirée sur la route, d'autos, motos, soldats. Nous décidons à voix basse de demeurer jusqu'à la nuit. Nous partageons quelques biscuits et le chocolat restés dans nos musettes. Nous dînons d'un pot de confitures que par bonheur nous avions avec nous. Nous récitons notre chapelet, et nous nous confions ardemment au Bon Dieu et à la Sainte Vierge.

    A 11 heures du soir environ, le calme s'est fait; mais un poste est certainement tout près, car les autos font halte à quelque 30 mètres de nous, et nous entendons parler. Des hommes travaillent sur la route; nous entendons frapper. Enfin, nous sortons de notre haie, rampons pendant environ 3/4 d'heure à travers champs. Enfin, nous pouvons nous relever et marcher. Nous avions décidé de marcher en direction du
    sud-ouest, vers Montdidier. Nous nous appuyons l'un I'autre, car le chef Morin boîte un peu, et moi j'ai l'oreille dure. Il nous fut d'abord impossible de suivre la direction projetée. Des lumières, et toujours des coups que l'on aurait crus frappés sur des piquets nous mettaient en garde. Nous marchons donc vers le sud d'abord, et finalement traversons la route pour aller alors franchement au sud-ouest. Nous avions
    une boussole et la nuit était assez claire pour nous permettre de nous diriger à peu près.

    Vers 3 h 30 ou 4 heures du matin, le 8, la brume se lève légèrement et nous empêche de voir comme nous voudrions. Nous décidons d'arrêter d'ici peu. D'ailleurs, le jour ne va pas tarder. Mais pas un abri, la plaine partout. Pourtant nous sommes presque heureux. Crac! 4 ombres. Nous nous planquons et attendons en nous consultant quelques instants. Rien ne bouge. Est-ce des Français, qui tentent de rejoindre comme 
    nous? Est-ce des Allemands? Impossible de savoir. Pas un bruit. Nous nous relevons. C'étaient des Allemands. Ils nous font une sommation. Nous décampons comme des lapins. On nous tire dessus. Je suis blessé d'une balle dans la cuisse. Nous nous rendons.

    C'était le 8, au matin, à Maucourt.

    J'ai trouvé d'un bout à l'autre la conduite du chef Morin très digne, audacieuse et courageuse. J'étais heureux de le suivre.

    A l'hôpital, à Saint-Quentin (Hôpital Henri-Martin), où je fus envoyé, je trouvai les médecins lieutenant Dupuis, et sous-lieutenant Viaud, du 1er Bataillon. Je fus, en qualité de soldat du 41° confié aux soins du docteur Dupuis.

    Le docteur Dupuis a vu plusieurs blessés à Lihons. Il organisa le transport de ceux-ci, à défaut d'autres moyens, dans une charrette, qui dut être tirée, si je me souviens bien, par des camarades, sous la direction des Allemands.

    Je crois pouvoir affirmer que, c'est grâce à lui que le soldat Bertrand, de la 2° Compagnie, a été sauvé (il avait été blessé au genou).

    Du 41°, j'ai retrouvé à Saint-Quentin, le lieutenant Agnès de la 3° Cie, blessé au pied; Texier, de l'État-Major du 1° Bataillon, cycliste du Commandant; Quiviger et Le Bihan de la 10° Compagnie. D'autres encore se trouvaient là du 3° Bataillon. Le Bihan est amputé. Il a souffert énormément à l'hôpital et a été bien près de la mort à plusieurs reprises. Quiviger a été envers lui d'un très grand dévouement . . . 

     

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